Hébétée, la presse découvre avec effroi qu’elle n’a plus le monopole de l’info. Hier matin sur Franceinfo on pouvait lire: «DSK a rencontré des blogueurs dans un bar-PMU», via un article marqué du sceau de « l’exclu ». Dès les premières lignes de cette info équestre, il fallait s’attendre à l’emballement médiatique, la presse tenait son «scandale du jour», la machine était en marche….
Non, le scoop n’était pas scoop, puisque tout le monde savait, la rencontre «DSK et les blogueurs» du 07 septembre dernier était connu de «tous» dans ce milieu des blogs (politiques) au moins deux semaines avant. Si, l’info circule très bien sur le net et beaucoup plus vite que l’on ne l’imagine, c’était un «off», disons, un «chuut» c.-à-d. un secret connu par tous mais «le 1er qui le dit a perdu». Bref, un secret de polichinelle pour des agapes à «la Comète» que voici.
Les «sachants» savaient, ils n’ont pas dépassé le local poubelle, à l’extérieur du bistro. Tout a été dit ou presque, la riposte-blog a apporté des précisions poussant certains journalistes à des correctifs (édits), mais le mal était fait comme on pouvait le lire hier sur Libération en cache: « Il a connu les soirées au Sofitel et au Carlton, mais c’est dans un bar-PMU du Kremlin-Bicêtre qu’il a passé la soirée du 7 septembre. Changement de décor pour Dominique Strauss-Kahn qui … ». Non, le «repère» des blogueurs de Gauche n’est pas un «Bar-PMU» même si la vie des blogs (politiques) ressemble parfois à un sport équestre. Non, Dominique Strauss Khan n’a pas rencontré de simples turfistes et l’angle d’édition de la presse appelle quelques explications…
- Sur le respect du «off ». Contrairement aux journalistes, les blogueurs ont une éthique, disons, une éthique à Nicomaque, et c’est peut-être là le problème. Dans l’hypothèse d’une rencontre «DSK-Journalistes» par exemple, l’info aurait fuité et cela bien avant la rencontre, les quelques «piques» de DSK contre le gouvernement auraient fait les choux gras des éditorialistes dès le lever du jour, ce ne fut pas le cas pour cette rencontre entre DSK & les «Burkinabé du Web» – j’explique, le Burkina-Faso, pays d’Afrique, ex Haute-Volta, se traduit par «pays des hommes intègres»). La naïveté des respectables trublions du Web explique en partie le respect stricto sensu du «off» imposé par DSK. Il faut croire que DSK a été «surpris» lui aussi, par ce Amen et par le peu d’audience sur cette rencontre après les comptes rendus sur les blogs …
- De l’intérêt des « bonnes feuilles» de DSK sur le Gouvernement. Là, on touche le cœur du sujet. D’abord une chose, «Que celui a brisé le secret du off sur les propos polémiques se dénonce!» [Message de service]. S’attarder sur les seules «indiscrétions» sans mettre en avant l’avis de DSK sur les vrais sujets, c’est l’angle choisi par la presse dans ses éditions. Bonne ou mauvaise chose? Finalement, après réflexion, il est aisé de dire cela arrange bien tout le monde: 1. La presse d’abord, la polémique intéresse les lecteurs et fait vendre 2. Les blogs ensuite, de nouveau au cœur de l’actualité malgré l’attaque ad hominem de grande-sœur-la-presse jalouse de se voir remplacer par de simples amateurs, et 3. DSK, oui, «Jack is back», encore…
- Sur le supposé « off » brillamment respecté par les blogueurs. Chez les hommes et femmes politiques, la «stratégie carte postale» a horreur du silence médiatique, et on peut penser que la discrétion imposée par DSK ne l’était pas, ce qui fait dire à Elie Arié, présent lors de ce rendez-vous (je le cite): « pour ma part, je n’exclus pas l’hypothèse (…) que la « fuite » vienne de DSK lui-même, constatant que, une semaine plus tard, les grands médias ne parlaient toujours pas de cette «soirée historique». Possible, la carte postale de DSK n’avait pas trouvé preneur et l’hypothèse de la fuite organisée devient plausible. Autre hypothèse: «il y avait une taupe dans la salle!». Et si ça se trouve, des photos circulent déjà sur le Darknet, et pourquoi pas des vidéos, ou de simples bande-son vu le nombre de web-addicts présents ce jour là, smartphones à la main.
Au delà de la «polémique», il serait intéressant de s’interroger sur le choix numérique de DSK. Après le « Hello twitter! Jack is back« , puis ses deux billets sur la Grèce via linkedin (Slideshare) (1.#Grèce: «Apprendre de ses erreurs» près de 3.500.000.vues, 2. To my german friends (1.700.000 vues)), DSK confirme sa nouvelle stratégie de communication, l’ancien Boss du FMI fait encore une fois l’impasse sur les anciens moyens de communication. Exit donc l’interview télé, la vieille bonne tribune dans un grand quotidien, ou, un aparté avec un journaliste. C’est donc vers les blogueurs, de simples anonymes que s’est tourné le « presque candidat » de Gauche à la présidentielle 2012. Oui, n’en déplaise à l’institution, les blogs (politiques) font l’actualité, y participe très activement, et cela malgré les « faibles audiences ». Les paramètres de l’influence sont à redéfinir.
Lire: De l’interactivité et des contenus (presse, blogs, réseaux...)
La mutation numérique à laquelle nous assistons change nos moyens d’accès à l’info, et les blogs concourent à l’émergence de ces nouveaux supports d’information, le développement de l’interactivité et des contenus participe à la nouvelle visibilité (des politiques, mais pas que), changement de paradigme. Et une certaine presse découvre l’influence insoupçonnée des blogs, s’étonne et factorise ce qui l’échappe. La blogosphère vit certes de la presse, mais elle la commente, l’alimente souvent et la fait vivre. Non, les blogs ne sont pas morts, quant à la presse …
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